Indicateurs PMM – Suivi de la mise en œuvre du Pacte mondial pour une migration sûre, ordonnée et régulière

Article de blog écrit par Elspeth Guild (Jean Monnet ad personam Queen Mary University of London) et Dr Tugba Basaran (Cambridge University) et publié en anglais sur le blog du Refugee Law Initiative. Traduction réalisée par Lisa Hée et Maria Hagan (Cliniciennes de la Clinique Juridique Hijra).


Le Pacte mondial pour la sécurité, l’ordre et la régularité des migrations (PMM), a été adopté le 10 décembre à Marrakech et approuvé par l’Assemblée générale le 19 décembre 2018 par 152 voix pour, 12 abstentions et 5 voix contre par la République tchèque, la Hongrie, Israël, la Pologne et les États-Unis. L’adoption et l’approbation du Pacte n’est cependant pas la fin du processus, mais seulement le point de départ. Pour la bonne mise en œuvre du Pacte, un système d’examen qui fonctionne bien est essentiel. Cela est également reconnu dans la dernière section du Pacte, consacrée au suivi et à l’examen (paragraphes 48 à 54).

Pour l’examen de la mise en œuvre du Pacte, le PMM précise :

 

“Nous examinerons les progrès accomplis aux niveaux local, national, régional et mondial dans la mise en œuvre du Pacte mondial dans le cadre de l’Organisation des Nations Unies grâce à une approche conduite par les États et avec la participation de toutes les parties prenantes concernées ” (par. 48).

Deux processus complémentaires sont prévus pour examiner l’état d’avancement de la mise en œuvre : un examen au niveau mondial, coordonné par le nouveau Forum d’examen des migrations internationales, doit se réunir tous les quatre ans à partir de 2022 (par. 49) [1]. L’examen mondial est complété par un examen de la mise en œuvre dans les régions, à partir de 2020 et en alternance tous les quatre ans au niveau mondial (par. 50). Le PMM encourage également les États à procéder à des examens réguliers et inclusifs des progrès réalisés au niveau national, par exemple par l’élaboration et l’utilisation volontaires de plans nationaux de mise en œuvre (par. 53). “Le Président de l’Assemblée générale doit lancer et conclure, en 2019, des consultations intergouvernementales ouvertes, transparentes et inclusives à tous afin de déterminer les modalités précises et les aspects organisationnels des forums d’examen des migrations internationales, et préciser comment les contributions des examens régionaux et autres processus pertinents éclaireront les forums, comme moyen de renforcer encore l’efficacité et la cohérence globales du suivi et de l’examen décrits dans le Pacte mondial ” (par. 54).

Cependant, la question la plus urgente est, à notre avis [Pr Jean Monnet et Dr Tugba Basaran], de savoir quels seront les critères en fonction desquels ces examens, plans de mise en œuvre et autres mécanismes seront mesurés. Dans notre série de blogs qui ont mené à l’adoption du PMM, nous avons analysé chacun des 23 objectifs et souligné le caractère central des obligations internationales des États en matière de droits humains (auxquelles ils ont volontairement adhéré dans les conventions des Nations Unies qu’ils ont signé et ratifié). Les objectifs, comme nos blogs l’ont montré, fournissent une sorte de menu d’actions possibles que les États peuvent prendre pour mettre en œuvre ces objectifs. Mais les choix que font les États doivent être guidés par leurs engagements en matière de droits humains. La mise en œuvre doit être compatible avec les droits de l’homme internationalement reconnus de toutes les personnes, y compris les migrants.

Dans cette série de blogs, nous examinons les objectifs en vue de leur mise en œuvre. Chaque objectif doit être examiné afin de déterminer ce que les personnes chargées d’examiner la mise en œuvre devraient surveiller, en s’assurant que le PMM est appliqué correctement (et que les droits de la personne sont respectés de façon uniforme). Le point de départ est l’identification d’objectifs dont les évaluateurs peuvent tenir compte lorsqu’ils examinent la mise en œuvre nationale. Ces objectifs peuvent ensuite servir de base à une évaluation dans la pratique. La question que nous nous sommes posés est la suivante : quels indicateurs les évaluateurs devraient-ils rechercher pour savoir si un État applique correctement le PMM ? Pour chaque objectif, nous avons cherché à fournir quatre ou cinq indicateurs simples qui peuvent être facilement vérifiés pour déterminer si les États appliquent correctement le PMM. Ils fournissent un point de départ pour les évaluations – une sorte de voile de protection qui clarifie où l’attention doit être accordée. Ils ne couvrent pas tous les aspects de chaque objectif – un tel projet nécessiterait de nombreuses pages de conseils et fatiguerait le lecteur et l’évaluateur. Au lieu de cela, ces blogs se concentrent sur les questions fondamentales : un nombre limité d’indicateurs qui révèlent si une enquête plus approfondie est nécessaire de toute urgence ou si l’État fait au moins en surface un véritable effort pour mettre en œuvre correctement et dans le respect des droits humains le PMM.

Parce que le PMM lui-même accorde une si grande importance aux droits de la personne à l’échelle internationale, nous commençons également dans nos blogs par une indication du droit de la personne pertinent pour la mise en œuvre de chaque objectif. A partir de ce point de départ, le blog indique ce qu’il faut rechercher dans la législation et la pratique nationale pour savoir si l’Etat progresse bien vers l’objectif ou s’il va dans la mauvaise direction. Ces blogs sont conçus pour aider les experts et les profanes à comprendre ce que nous pouvons attendre de la mise en œuvre nationale du PMM. Il est important de se rappeler que le PMM n’est pas juridiquement contraignant. Au lieu de cela, il a exprimé la volonté politique des États qui l’ont signé. En tant que tels, les États sont liés politiquement les uns aux autres et à la communauté internationale collectivement pour commencer à mettre en place des lois et des pratiques qui sont pleinement compatibles avec le PMM. Ces blogs aideront les États à trouver leur chemin à travers le PMM pour une mise en œuvre correcte.

Nous espérons également que ces blogs pourront aider les États engagés dans les processus d’examen périodique universel de l’ONU. En effet, l’EPU est fondé sur l’examen des engagements des États en matière de droits de l’homme. Le PMM donne une spécificité aux obligations des États en matière de droits humains dans le cadre du droit et de la pratique de la migration, en tant que cadre coopératif dans lequel les États devraient opérer. Ainsi, le processus d’examen par les pairs est particulièrement bien conçu pour tenir compte des engagements politiques des États concernant l’application de leurs droits humains internationaux aux migrants.

[1] Un certain nombre d’acteurs sont invités par le PMM à contribuer au processus, comme le Dialogue international de l’OIM sur la migration et les processus consultatifs régionaux (paragraphe 52).